Les armures des morts
‘est au détour de la route qui traverse la plaine d’Alponsène que l’on peut tomber sur un vieil artefact, témoin d’un temps révolu et d’une barbarie sans nom. Posée contre un rocher, à moitié enterrée ou debout, l’armure tarpanique vous fixe de ses orbites caves. Malgré son métal rouillé, son immobilité centenaire et le vide qui l’habite, l’armure dégage une aura malsaine qui laisse une impression dérangeante à quiconque croise sa route.
L’armure est grande, trop grande pour un homme. Ses bras sont trop longs, sa taille trop fine. Ce sont pourtant bien des femmes et des hommes qui ont habité ces armures lors de guerres fratricides.
Qu’ils soient esclaves, prisonniers ou malheureuses victimes, ceux qui tombaient entre les mains des sorciers de l’armée de Tarpan étaient mutilés et démembrés, liés par la forge et la magie à devenirs immortels, leur esprit à jamais piégé dans leurs habits de fer, forcés de servir leur nouveau maître.
Quand la guerre prit fin, la plaine d’Alponsène devint une friche stérile abandonnée par les voyageurs et les armures privées de maître restèrent là, immobiles, à attendre un ordre qui ne viendrait plus jamais.
Certains prétendent avoir vu bouger une armure, d’autres ont entrepris de les ouvrir pour n’y trouver que du vide. D’autres encore, en s’approchant de leur masque mortuaire, jurent avoir entendu une voix. Une voix fébrile, un simple murmure, à peine chuchoté. Un appel à l’aide.